Ces masses noires qui apparaissent devant vous, sur la route, après la brunante. Ces voitures qui roulent sans aucun feu de position, en pleine noirceur, avec tous les risques et dangers que cela implique.
Je ne sais pas pour vous, mais ça me met en furie à chaque fois. J’ai même compté récemment, en une poignée de minutes, au moins quatre véhicules sur dix qui roulaient sur ce mode furtif involontaire. Avec les dangers que vous imaginez.
Il n’est pas question ici de vieilles guimbardes ou de «minounes» dont les phares et les ampoules sont grillés, déconnectées ou privées de tout courant électrique. Avec un peu de chance, celles-là se font intercepter et chasser de la route rapidement.
Je pense plutôt à des véhicules récents, sinon flambant neufs, qui roulent dans le noir, sans aucun feu de position. Parce que le commutateur est à «off» et qu’ils ne sont pas allumés, tout simplement.
Et l’être humain distrait ou inconscient qui est au volant ne se doute de rien parce que le tableau de bord et les cadrans de sa voiture sont joliment illuminés. C’est pire s’il y a quelques lampadaires pour éclairer la route le moindrement et d’autres voitures à suivre docilement.
Phares de jour: une œuvre inachevée
Tout ça à cause des «phares de jour» que la même agence gouvernementale a rendus obligatoires pour tout véhicule léger neuf vendu au Canada en 1989. L’idée était de réduire les risques de collision frontale en rendant les véhicules plus visibles en plein jour. Et on avait des études pour le démontrer.
Les gens de Transports Canada disent que s’ils n’ont pas imposé également l’allumage permanent des feux de position arrière à l’époque, c’est qu’ils ne pouvaient démontrer aussi clairement que c’était une bonne idée. Ils se fiaient également au fait que le tableau de bord n’était éclairé que lorsque les feux et phares étaient allumés volontairement. Ce qui était doublement important puisque ces nouveaux phares de jour ne projetaient qu’une lumière blafarde.
Les choses ont cependant vite changé lorsque l’électronique a transformé le tableau de bord en spectacle son et lumière, éliminant du même trait ce réflexe salutaire. Le coût d’allumer aussi les feux arrière aurait pourtant été infime, en comparaison avec le gain potentiel en sécurité.
Mais ne vous y trompez pas: malgré la lourdeur inévitable d’un organisme qui doit fixer les règles pour un domaine aussi complexe et gigantesque que les transports, on ne manque pas de cerveaux allumés à Transports Canada. Oui, j’en ai rencontré. Ces gens sont conscients du ridicule de la situation et font actuellement le nécessaire pour la corriger.
Il faut dire que l’organisme reçoit un flot constant de plaintes écrites des citoyens au sujet du nombre croissant de ces «véhicules fantômes» sur nos routes. L’ennui, c’est que ça va prendre du temps, hélas. L’amendement publié le 27 février 2016 prévoit effectivement que les feux arrière ne devront être allumés en tout temps qu’à compter du 1er septembre 2020, au mieux.
Prenez le contrôle et gardez-le
Réglez donc ce problème dès maintenant, de la meilleure manière qui soit, en allumant vos phares au maximum dès que le contact est mis. Et laissez-les allumés en tout temps, le jour comme la nuit, pour mieux voir et être mieux vus, quelles que soient les conditions.
Faites-le même si la commande des feux offre un réglage «auto», pour que les phares soient toujours à pleine intensité et tous les feux de position allumés. Même s’il fait clair pendant une averse féroce qui réduit fortement la visibilité, par exemple.
Quand on songe aux bienfaits immenses de cette habitude toute simple, en termes de sécurité, il n’y a aucun argument de coût qui tienne. Surtout à une époque où prolifèrent les diodes électroluminescentes (DEL) qui ne consomment rien en électricité et sont pratiquement éternelles.
Mais de grâce, ne laissez pas allumés aussi, en permanence, ces phares d’appoint qu’on n’est censé utiliser que lorsqu’il y a du brouillard et qui n’ont généralement pour effet que d’éblouir ou aveugler ceux qui roulent en sens inverse. Même si les jeunes et des moins jeunes trouvent que ça leur donne un air «cool».